Pascale Mageau-Béland

Après avoir travaillé comme ingénieure et goûté à la grande ville, Pascale Mageau-Béland a décidé de changer de cap et de reprendre la ferme familiale J. L. Béland située à Plaisance en Outaouais pour y élever des dindons. Un choix de vie, tout simplement.

Une vie choisie

Pascale Mageau-Béland avait envie de faire œuvre utile et aussi de travailler pour elle-même lorsqu’elle a quitté son emploi comme ingénieure pour consacrer tout son temps à la ferme. Si la transition peut sembler vertigineuse, elle avait tout de naturel pour cette dernière. Élevée jusqu’à l’âge de 14 ans à proximité de la ferme de poulets de chair de ses parents à Saint-Gilles de Lotbinière, puis sur la nouvelle ferme familiale de volailles et d’œufs de Plaisance en Outaouais, elle avait quelques notions de ce métier et de ses exigences.

Cette fille et petite-fille d’éleveurs a toutefois mis du temps avant de revenir aux sources et de se laisser tenter par la ferme et l’élevage. « Je me suis décidée sur le tard, avoue-t-elle. À l’âge d’aller au cégep, je suis partie à Montréal. J’ai ensuite étudié en génie chimique et travaillé comme ingénieure, mais, après cinq ans j’ai bien vu que ce n’était pas ce que je voulais faire à long terme. À cette époque, je revenais plus souvent à la ferme. C’est là que j’ai signifié à mon père mon intérêt pour la ferme et ce métier. » Pascale Mageau-Béland a travaillé 11 ans comme ingénieure à Montréal, y a rencontré son mari et complice, Marc-Olivier Huot-Drouin, ingénieur de formation comme elle, qui a choisi de la suivre jusque dans l’Outaouais et d’embrasser ce projet qui lui tenait à cœur.

Histoire mouvementée

« L’histoire de la ferme est un peu compliquée, explique Pascale. La ferme J.L. Béland située dans Lotbinière appartenait à mon grand-père Jean-Louis Béland, d’où les initiales J.L. Mon père, Nil Béland, a pris la relève en 1994 et comme il ne pouvait y faire que de l’élevage à forfait, il voulait accéder à du quota. Il a vendu la ferme de Saint-Gilles en 2003 pour déménager dans l’Outaouais où des quotas d’œufs et de poulets de chair étaient accessibles. » Nil Béland, qui est aussi agronome de formation, a lentement mais sûrement transformé sa nouvelle acquisition. « Dès son arrivée, il a refait l’intérieur d’un bâtiment pour y installer un nouveau système et déplacé un autre bâtiment pour respecter les normes de distance entre différents élevages. » Les années se sont écoulées jusqu’à ce que Pascale et son conjoint achètent en 2017 une part de quota du père de Pascale et une terre à Plaisance pour démarrer la ferme d’œufs de consommation Pascale et Marco. Les mécanismes s’enchaînent alors très vite et, en 2018, le couple décide de prendre la relève et de mettre en branle le processus d’acquisition de la ferme J.L. Béland qui aujourd’hui fait voisiner des poules pondeuses bio, la production d’œufs de consommation et un élevage de dindons.

Le transfert de la ferme J.L. Béland sera complété en 2024. Un transfert qui s’est effectué en douceur, après des discussions impliquant le frère et les sœurs de Pascale, Geoffroy, Judith et Blanche. « Nous sommes une famille très proche et mon frère et mes sœurs n’avaient manifesté aucun intérêt à reprendre la ferme. Il y a cinq ans, nous avons tout de même rencontré une intervenante externe pour bien nous assurer de façon individuelle des intérêts de chacun pour la ferme. Nous avons suivi toutes les étapes pour ne pas créer de tensions. »

L’apprentissage du métier

Si la ferme Pascale et Marco a servi de tremplin à son apprentissage, Pascale Mageau-Béland doit maintenant jongler avec trois types de productions. Heureusement, elle peut compter sur l’expertise de son père qui habite tout près et sa formation d’ingénieure. « Quand il faut faire des modifications ou de nouveaux bâtiments, j’ai déjà vu ça dans mon autre métier. Je sais aussi budgéter des projets et il y a aussi des similarités entre le suivi de production dans une usine et celui de la ferme. La ferme est maintenant informatisée, alors j’utilise des outils que j’avais développés dans le passé. »

L’élevage de dindons légers est un ajout tout récent à la Ferme J.L. Béland et la dindonnière, installée dans un ancien bâtiment qui abritait les vaches du voisin, toute neuve. « J’ai une approche quasi scientifique au métier. À la ferme Pascale et Marco, tout était informatisé. Comme on travaillait encore à Montréal et qu’on avait un employé sur place, on faisait nos suivis à distance. La dindonnière est aussi informatisée et automatisée et j’utilise les données pour m’aider dans mon travail. Avant on devait entrer dans la bâtisse pour voir et sentir un problème. J’arrive souvent aux mêmes conclusions ou à prévenir les problèmes en me basant sur les chiffres, et ce avant même d’entrer. » Même si l’approche de Pascale est d’abord cartésienne et la pousse à effectuer des recherches sur les méthodes et les techniques en vigueur en Europe ou aux États-Unis, elle ne néglige jamais la tournée journalière de ses volailles pour veiller à leur bien-être. « On sous-estime souvent combien les éleveurs tiennent à leurs animaux », mentionne-t-elle en soulignant que ce ne sont pas uniquement des sources de revenu. Lors de ses visites, elle se fait accompagner quelquefois par ses deux fillettes Florence, 6 ans, et Simone, 3 ans. Si l’aînée prend plaisir à flatter les dindonneaux et aide parfois sa mère quand vient le temps de nettoyer le bâtiment entre les lots, la plus jeune se montre plus craintive.

Son père demeure présent, sans toutefois s’imposer. Il ne veut pas être dans nos jambes, explique-t-elle, mais il est toujours là, au bout du fil, pour lui fournir de précieux conseils quand elle en a besoin ou pour discrètement effectuer certaines tâches qu’elle a notées sur un tableau à l’entrée de ses bâtiments.

Gestion du temps et vie de famille

Bien qu’en Outaouais la production de volailles se fait rare – tout comme les services à l’avenant -, Pascale a su s’entourer de gens qui viennent lui porter main forte. La jeune éleveuse qui attend un troisième enfant (au moment du reportage) peut se fier sur ses deux employés, un à temps plein la semaine et un autre à temps partiel la fin de semaine et sur Marc-Olivier. Ce dernier qui a conservé son emploi comme ingénieur afin d’assurer une stabilité financière à la famille est toujours là pour les gros travaux. Quant à Pascale, elle visite les installations tous les jours de la semaine, administre les deux fermes et s’occupent des échanges avec le couvoir, la meunerie, le vétérinaire, le producteur et transformateur d’œufs ainsi qu’avec le grand transformateur chez qui toute sa production de dindons est vendue. « Je travaille la semaine, et la fin de semaine je m’occupe seulement des urgences. Malgré le fait que nous n’avons pas beaucoup de quotas, nous avons décidé tout de même d’avoir des employés pour avoir nos fins de semaine. Ça vaut cher pouvoir profiter de ses fins de semaine, surtout avec une petite famille! » Elle avoue aussi que pour sa santé mentale, cette pause est judicieuse. Être jeune maman et éleveuse à temps plein comporte son lot de sacrifices. Avec son accouchement qui approche, l’idée d’un congé de maternité lui semble impossible. « Avec la structure de l’entreprise, j’ai accès au congé de maternité, mais il n’y a vraiment personne pour me remplacer et faire ce que je fais. Je suis toutefois bien entourée et on a trouvé un compromis. » Elle poursuit en avouant qu’elle ne se serait jamais lancée dans une production qui n’est pas sous gestion de l’offre. « Je veux être payée d’une façon convenable tout en faisant de mon mieux. Ce n’est pas un système parfait, c’est difficile d’y accéder, mais je suis vraiment contente qu’il soit là. »

Pascale est fière de ce retour à la ferme qui donne un sens à sa vie, correspond à ses valeurs à la fois environnementales et durables et qui lui permet – en plus de nourrir les gens – d’offrir un milieu de vie plus intéressant pour ses filles tout en étant proche de ses parents. « C’est tout cela qui me rend plus contente de mon choix », termine-t-elle en rêvant du jour où sa ferme de dimension familiale lui permettra de vivre confortablement.

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